wapasha Langue pendue
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| Sujet: Discrimination : le CNE respecte-t-il le droit européen ? Ven 22 Juil à 16:06 | |
| humanite-Article paru dans l'édition du 21 juillet 2005. Discrimination : le CNE respecte-t-il le droit européen ? - Citation :
- Notre commentaire
Le contrat « nouvelles embauches » est-il légal au regard des engagements internationaux de la France ? L’ordonnance qui met en place le CNE soulève plusieurs questions. D’abord, celle du motif du licenciement. La convention de l’Organisation internationale du travail du 23 novembre 1985 oblige en effet l’employeur à donner un « motif valable » au licenciement. La charte sociale européenne (une charte du Conseil de l’Europe) et la charte des droits fondamentaux de l’Union interdisent de leur côté le licenciement « sans motif valable lié à leur aptitude ou conduite, ou fondé sur les nécessités de fonctionnement de l’entreprise » ou « injustifié ». Ce sont des traités internationaux signés par la France, ils s’imposent donc en droit interne, et peuvent être mobilisés devant les tribunaux.
La seconde question concerne le principe d’égalité, un des droits fondamentaux défendus par les traités européens (lire à ce sujet « Contrat « nouvelles embauches » et droit communautaire », par Katell Berthou, dans la Semaine sociale Lamy, nº 1224, 18 juillet 2005). L’article L. 122-45 du Code du travail, qui doit beaucoup au droit de l’Union européenne, interdit toute forme de discrimination (fondée sur le sexe, l’âge, l’origine...) en matière d’embauche, d’évolution de carrière ou de licenciement. Le projet de CNE ne protégeant pas contre ces discriminations, les salariés devront vérifier a posteriori si leur licenciement comporte ou non des éléments qui laissent supposer l’existence d’une discrimination.
Plus intéressant encore, on peut recourir au concept de discrimination indirecte, issu lui aussi de la jurisprudence communautaire : on parle de discrimination indirecte quand un critère d’apparence neutre désavantage particulièrement une catégorie par rapport à une autre. Le CNE est un bon exemple : il soustrait aux règles du licenciement des salariés appartenant aux entreprises de 20 salariés et moins, dans lesquelles les femmes sont statistiquement plus représentées que les hommes. D’apparence neutre, il désavantage donc les femmes par rapport aux hommes.
En 1999, la Cour de justice des communautés européennes a eu à statuer sur une affaire qui concernait une loi britannique similaire au contrat « nouvelles embauches ». Dans son arrêt, elle a estimé que si les statistiques indiquaient qu’un pourcentage considérablement plus faible de femmes que d’hommes atteignaient la durée d’activité nécessaire pour bénéficier d’une protection contre le licenciement abusif, alors la discrimination indirecte fondée sur le sexe était établie. Ce concept, encore peu mobilisé devant les tribunaux français, offre pourtant un outil intéressant pour faire reculer les discriminations. Et peut pousser les employeurs à adopter des pratiques plus responsables. Ce qui n’est évidemment pas l’objectif du gouvernement. L. B. source : http://www.humanite.fr/journal/2005-07-21/2005-07-21-810803 @+ | |
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