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 Réinsertion : Baston et discriminations

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FleurOccitane
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Nombre de messages : 5959
Localisation : Toulouse
Date d'inscription : 30/04/2005

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MessageSujet: Réinsertion : Baston et discriminations   Réinsertion : Baston et discriminations EmptySam 18 Mar à 23:14

Citation :

Réinsertion : Baston et discriminations

Récit de mon aventure dans une « entreprise d'insertion » parisienne :
Ici, (comme ailleurs, me direz-vous) on privilégie le blanc, le « vrai français » et c'est probablement parce qu'il faut bien habituer les jeunes aux discriminations qu'ils subiront, quand ils auront un vrai travail...d'intérim.

Réinsertion : Baston et discriminations

Le premier jour de chantier, le responsable, le chef des encadrants techniques" (peut-être pour faire connaissance) m'emmène faire des courses à Casto et au Point p, pendant que les autres, les noirs et les arabes, dont un nouveau (comme moi) à qui le patron avait adressé à peine trois mots, travaillent. Le deuxième jour, rebelote. Je lui fais part de mes réticences et lui demande d'emmener quelqu'un d'autre. J'évoque le juste partage des tâches et lui rappelle ce qui est arrivé a Paul qui s'est fait insulter et cracher dans ses chaussures et qui n'est pas revenu depuis. Le boss me répond que Paul a dit devant le groupe qu'« il n'avait rien à faire ici avec ces racailles ». Il ajoute qu'en plus Paul aurait "des problèmes psychologiques, les autres l'ont remarqué et en ont profité". J'avais pas remarqué que Paul avait des problèmes psy, pour moi il a été un peu maladroit, mais, question orientation, là, je suis un peu d'accord avec lui. Avec son bac+3 , Paul n'a pas été correctement « orienté », et encore moins, s'il a véritablement des problèmes psychologiques.

Donc malgré mes réticences, le patron m'emmène à nouveau faire les courses...Et à l'heure du repas (pris en commun pour favoriser la convivialité) je constate malheureusement et comme je le craignais, que « les jeunes » se sont montés la tête toute la matinée. Ils sont tout excités et l'effet de groupe joue à plein régime d'autant que ce jour là, il n'y a que deux « encadrants » au lieu de trois. Comme une bande de petits flicaillons amateurs ils me tombent dessus exigeant des précisions sur mon emploi du temps. Moi, y'a pas moyen que je me couche, je leur réponds sur le même ton en les invitant à se plaindre au boss...Celui qui, la veille, m'avait prévenu qu'il faut pas se mettre le groupe a dos (comme Paul) lance : « si c'est pas moi, y aura bien l'un d'entre nous qui te mettra au pas ». Et soudain, sans aucune vraie raison, l'un d'entre eux passe à l'acte de manière très brutale… Coup de boule et coup de poing bien réussi… Ne voulant pas passer pour un faible, me réservant la possibilité de continuer à « évoluer » dans cette structure, considérant qu'il y a peu de danger puisque les encadrants ne sont pas loin...et aussi par orgueil, je fais front. Je tente une prise, au moins, je protége ainsi ma gueule, même si avec son bras libre l'autre me matraque lourdement le haut du crâne ce qui me permet de compter les secondes en attendant que les responsables du chantier viennent nous séparer. Mais les encadrants, et cela alors que ça chauffait, avaient pour quelques instants, tourné le dos...ça faisait un bail que je n'avais pas été directement confronté à la violence et j'étais très en colère que l'on m'ait mis dans cette situation. J'ai quitté le chantier et suis allé chez le médecin faire constater les dégâts…

Les jours qui ont suivi cet événement, sur le lieu de « formation », j'ai du faire face, seul...j'ai du lors de la pause cigarette, aller parmi les autres pour discuter avec eux, discuter avec celui qui m'avait agressé et tenter avec mes moyens d'arranger les choses. J'ai été beaucoup plus choqué par la non implication de l'ensemble des responsables de cette structure que par le « comportement de l'agresseur ». Que ce jeune ait agi en service commandé ou par simple impulsivité, j'ai du faire face à l'effet de groupe, avec des meneurs et des suiveurs plus ou moins acteurs. J'aurais apprécié qu'il y ait une médiation, un débat collectif, bref, une démarche de la part de l'encadrement, mais là, rien.

Par la suite et durant une journée passée, seul à seul avec le responsable des chantiers, (Rmiste et pas dans les mêmes conditions contractuelles, je devais effectuer une journée de travail sup.) j'ai eu connaissance de la composition des groupes prévus pour le lendemain. Dans mon groupe, on avait prévu Paul, l'autre victime (de retour, peut être), Bernard un homme d'une quarantaine d'années et comme encadrant, le responsable des chantiers. Ce groupe, composé de français de souche, ou du moins, uniquement de blancs, devait faire du carrelage, une tâche rare et appréciable si l'on considère que le travail proposé est peu diversifié puisqu'il s'agit « en particulier de peinture, sur des chantiers de rénovations ». Je me suis risqué à évoquer l'autre nouveau, qui avait peut être envie de faire du carrelage....pas de réponse. Dans le courant de la journée, alors que je faisais office de psy, écoutant patiemment le patron me raconter sa vie...une phrase, lui a échappé : « j'ai pas fais la guerre d'Algérie pour me laisser emmerder par ces... » Favoritisme, groupe raciaux, ma décision était prise, impossible de continuer, pas question de revenir le lendemain.

Plus tard, j'ai appris que les groupes de travail avaient été spécialement organisés de cette manière afin d'éviter les tensions, les bagarres et les vexations. Ca ! C'est du professionnalisme ! Plus tard encore, alors que je m'étais rendu accompagné dans leurs locaux pour discuter de mon avenir, l'un d'eux a glissé à l'oreille d'une des personnes qui m'accompagnaient :
« Il a des graves problèmes psychologiques »

Ainsi dans ce lieu, où l'on est sensé « réinsérer », on dresse les jeunes, les uns contre les autres on culpabilise, on stigmatise… Tout ça c'est de leur faute, ils ont des graves problèmes psychologiques...

Comme on peut le constater, on est loin des conditions qui permettront aux candidats à la réinsertion "d'acquérir ou de redécouvrir des connaissances nécessaires pour faire face aux exigences minimales de la vie sociale" (règlement intérieur). A mon sens, l'apprentissage de ces connaissances devrait se faire dans un cadre où l'écoute mutuelle règne, un cadre où les jeunes se sentent valorisés, encouragés et non rabaissés, réduits à l'image fantasmée qu'on en a. Reste, bien sûr, à déterminer quelles sont les connaissances nécessaires pour répondre aux "exigences de la vie sociale" ? On pourrait déjà commencer par leur apporter les connaissances qu'ils demandent au niveau culturel, historique, artistique...et pas simplement se contenter de l'apprentissage des fractions ou de quelques règles d'orthographe avec des manuels d'avant guerre et une absence totale de pédagogie pour certains des dits « professeurs bénévoles ».

Dans cette « entreprise » où l'on croit à la réinsertion par le travail, où la dignité de l'individu est quelque peu réduite à sa force de travail et à l'apprentissage de leçons d'écolier, épanouissement n'est pas un mot employé tant il est entendu que les hommes s'épanouissent parce qu'ils sont au travail et non parce qu'ils ont une activité professionnelle choisie et des activités annexes riches et variées.

Cette association pense pouvoir faire, en son sein, le travail d'enseignants, de psychiatres, psychologues, éducateurs, formateurs, animateurs, gardiens de prison...Et tout cela, pèle mêle, avec une bande d'amateurs dont l'aveuglement n'égale pas la suffisance En fait, la philosophie même du lieu, les pratiques et les règles instaurées aboutissent à l'infantilisation du « sujet » donc totalement à l'opposé du but recherché pour une structure qui se veut éducative ou de réinsertion. Enfin j'imagine... Par exemple, les bagarres, comme celle que j'ai, moi-même, expérimenté, sont considérées comme des évènements courants et, « pas très graves » (dixit,"tuteur"). L'usage veut que l'on se serre la main et c'est fini.

Après tout les hommes se battent c'est normal ! C'est des hommes, des vrais !

En plus, malgré la manifeste bonne volonté des encadrants, (on peut au moins leur accorder ça) du fait qu'ils considèrent les jeunes et tout particulièrement ceux dont ils ont la responsabilité comme des inférieurs, « des jeunes difficiles », il leur arrive de pratiquer des descriminations. En ce lieu, sûr qu'on se bat pas contre le système, ni même pour le rendre meilleur, on le sert et cela brutalement, sans nuances, sans se poser questions.

Le « public accueilli » dans ce lieu est très souvent issu de minorités qu'on qualifiera de "visibles" et sont l'objet de discriminations de classes et du plus pur des racismes Beaucoup ont eu des parents ouvriers qui se sont retrouvés parqués, mis ensemble dans des impasses. Programmés pour faire de leurs enfants des ouvriers…Ce faisant, on ne pratiquait plus seulement une discrimination de classes, mais un racisme massif institutionnel, d'ailleurs, on continue… L'activité salariée proposéé ici est unique : travail sur chantier.

"Ha non j'oublies y'a une chtite semaine prévue pour arracher les mauvaises herbes dans l'jardin a gegeor"...

Dans cette structure hybride, ou l'emploi n'en pas vraiment un, on a la volonté d'initier les jeunes à la dure loi du monde en guerre économique mondiale et permanente entre individus et nations. On leur apprend à se lever tôt le matin ! Une obligation que les jeunes ne connaissent que trop bien puisqu'ils ont vu leurs propres parents la subir au quotidien et puisqu'ils l'ont déjà rejetée a l'époque où, eux-mêmes, se levaient pour aller a l'école. Et là, sans motivation, mais par obligation, ils y parviennent parfaitement prouvant ainsi qu'ils sont parfaitement aptes au travail. La question qui se pose est donc celle de l'utilité de cette pseudo réinsertion-formation pour des jeunes qui ne paraissent pas volontaires, qui manifestement s'ennuient et apprennent peu de choses puisqu'on leur propose peu de chose à apprendre.

En fait, dans cette structure ce sont les jeunes qui soignent les vieux ! En accomplissant ce que l'on attend d'eux, en se levant 5 fois par semaine, en subissant la bêtise et l'incompétence de leurs geôliers, ils les guérissent de leur culpabilité. Ce sont les éduqués qui donnent du bonheur à leur "éducateurs" auto satisfaits, qui les valorisent, en leur donnant l'impression d'être utiles et en acceptant de subir au jour le jour cette persécution. En quelques mois de grattages et de peinturlurages (payés au salaire minimum (CA, CAE) pour 20 h. semaine passées sur le chantier) la petite entreprise en fera, avec de la chance, des ouvriers passables pour les plus motivés d'entre eux et des chômeurs pour les autres... Les jeunes sans emplois sont-ils des délinquants qu'il faut punir ?

Mais c'est bien sûr, me direz vous, tous ces jeunes, triés sur le volet, sont parfaitement récupérables et ils ont quitté le système scolaire parce qu'ils veulent gagner leur vie mais manquent de qualifications...Notre but, à nous, formateurs c'est de les dégoûter du monde du travail afin qu'ils reprennent le chemin des études pour se construire un bel avenir…

Rédacteur article:51672 pololprolo
le lundi 20 février 2006 à 19h56

http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=51672
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