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 A 20h tu compatiras ! ...

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FleurOccitane
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Date d'inscription : 30/04/2005

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MessageSujet: A 20h tu compatiras ! ...   A 20h tu compatiras ! ... EmptyMer 14 Sep à 8:23

Citation :

A 20h TU COMPATIRAS !...
Lorsque la morale supplante l’information

dimanche 4 septembre 2005 par pierre delvaux.

Souvent le traitement de l’information ne nous heurte plus vraiment... Et pourtant les exemples abondent de la substitution des sentiments, de la morale, de l’émotion au travail d’informer qui pourtant devrait être le seul souci des médias qui y prétendent...

Entendre un présentateur ouvrir son JT en affirmant : « Bonne nouvelle ! le chômage a baissé de 1%... », cela ne nous étonne plus aujourd’hui, surtout quand cela se passe sur une chaîne privée et qu’il s’agit d’un tout jeune journaliste. On sursaute un peu plus en entendant un journaliste confirmé d’une chaîne publique ouvrir son édition par : « On peut dire que le plan d’évacuation de la bande de Gaza se passe bien !... » Dans les deux cas cités à titre d’exemple, il n’y a certainement pas volonté délibérée du présentateur d’imposer un point de vue. Ce sont simplement deux exemples symptomatiques du disfonctionnement de l’information télévisée causé par deux pièges pervers : d’une part la proximité sociale entre les rédactions et les cercles de pouvoir (privés et étatiques) ; d’autre part le phagocytage de l’information par son medium télévisuel, lequel puise abondamment son inspiration chez ses collègues anglo-saxons.
LA COM’ CONTRE L’ INFO

Au-delà, même, de la vérification des sources, c’est la forme sous laquelle sont livrées les informations par ces sources qui devrait questionner davantage les rédactions. Qu’elles émanent des cabinets ministériels, des diverses "com" de sociétés ou de nulle part (informateurs officieux et commentateurs appointés ou non). L’important n’est pas seulement ce qui est affirmé mais les commentaires qui y sont adjoints. Il s’agit plus de faire passer un message qu’une information : on ne peut que se réjouir de l’annonce des chiffres du chômage ou du plan d’Ariel Sharon... Et on peut craindre que la proximité de certains journalistes avec leurs sources les amène à recevoir d’autant plus volontiers une « information » qu’ils y auront été préparés par le bruissement diffus du microcosme.

MELIES CONTRE VOLTAIRE

Faut-il rappeler que le langage de la télévision n’est rien d’autre que le langage cinématographique et que le cinéma s’est affirmé dès son invention comme un spectacle, un divertissement. Il est frappant d’entendre constamment au sein des rédactions des chaînes des réflexions comme : « ce sujet c’est que de l’émotion !... ». Les rédacteurs tendent à raisonner de plus en plus comme des producteurs, passant parfois plus de temps à se questionner sur l’habillage des sujets plutôt que sur leur contenu. L’important semble ne plus être d’informer mais de « faire vibrer » le téléspectateur, de le capter grâce à des trucs faisant le plus souvent appel à ses émotions. Ainsi, la déontologie journalistique semble de plus en plus annihilée par la dimension intrinsèquement spectaculaire qu’induit la télévision, l’enjeu majeur des rédactions consistant à coller à un présupposé sentiment général des masses. Une des phrases récurrentes lors des conférences de rédaction étant : "Mais cela n’intéresse personne ! » ou, à l’inverse : "Les gens adorent cela !"
QUE D’ EMOTION !

Quand il s’agit d’événement graves mettant en jeu des vies humaines, l’étalage récurent d’émotion médiatique confine à une sorte de "pornographie morale". Le citoyen-télespectateur en vient à se sentir gêné par ces assauts de compassion. Est-ce bien cela qu’attendent les victimes des événements en question ? Ils doivent "faire leur deuil" nous répète-t-on à satiété. Et après ? L’ampleur de ces campagnes émotionnelles n’est-elle pas inversement proportionnelle aux réponses politiques apportées aux événements en cause. Et n’est-ce pas justement à la confusion de ces deux aspects que vise tout ce bruit médiatique ? De fait, c’est aujourd’hui une idée répandue que médiatiser un problème c’est en partie le résoudre. D’innombrables mouvements sociaux ont fait les frais de cette funeste illusion !...
IN GOD WE TRUST

La laïcité est au centre de ce débat : ce qui relève de la sphère publique (l’information) et ce qui relève de la sphère privée (l’opinion, le sentiment). Les programmes de "téléréalité", les émissions d’« outing », les « docu-fictions » tendent à abolir cette frontière et leur apparition ces dernières années en France me semble correspondre aux multiples remises en cause de notre pacte républicain. L’idéologie libérale dominante ne repose-t-elle pas sur un communautarisme entrepreneurial du "bien commun" soudé par la loi divine : celui des pionniers du "Mayflower" ? George W. Bush ne s’était-il pas fait élire en 2000 en se présentant comme le candidat de la compassion ? En effet, le capitalisme s’est développé sous différents aspects depuis le moyen-âge. L’impérialisme américain étant le plus puissant, il est logique qu’il propage le caractère puritain si particulier qui l’imprègne : mon bien est sacré mais je ne cesserai d’avoir honte et de rechercher la rédemption. Cela passe par des rites communautaires d’expiation qui ciblent de préférence les moeurs (lire le roman d’Hawthorne, "la lettre écarlate" qui inspira l’indigeste film "les amants du nouveau monde" et se rappeler l’affaire Lewinski / Clinton). En nous invitant à nous frapper la poitrine, le journal de 20h veille à ce que nous ne remettions pas en cause l’ordre libéral.

Dans ce monde globalisé qu’on nous dit irréversible, le sentiment obligé constitue à l’évidence un des instruments majeurs de ce qu’on a coutume d’appeler aujourd’hui pudiquement "pensée unique" (qui n’est rien moins que la propagande capitaliste). Mais le chantage affectif est souvent une cause de rupture dans les couples. Les cercles du pouvoir auraient pu méditer cela depuis le 29 mai dernier s’ils ne se nourrissaient pas eux-mêmes de leurs propres chimères. Car le processus marche dans les deux sens !...

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A SUIVRE :

Pour garantir aux pouvoirs en place un flux de programmes idéologiquement uniforme, identifiable, contrôlable, les dirigeants de chaînes disposent de moyens qui ne relèvent pas seulement de la politique des programmes mais de ce qu’on appelle la « direction des ressources humaines". J’y reviendrai dans notre prochaine lettre.

Pierre Delvaux
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